Non... je n'ai pas eu à faire de deuil.
Quand mon fils a eu son diagnostic d’autisme, je n’ai pas eu de deuil à traverser, ni de peine à pleurer. C’était une confirmation pour moi. Ce n’était pas un choc, je comprenais et c’était rassurant pour moi de mettre un mot sur nos interrogations.
Quand, dans les réseaux sociaux, j’ai affirmé être bien avec la nouvelle et ne pas avoir de peine, cela a créé de vives réactions. À ma grande surprise.
On m’a dit que j’étais dans le déni, que je me cachais la vérité, que ce n’était pas vrai que je pouvais être bien avec l’autisme de mon fils, bref, un tas de phrases qui m’ont bouleversé. J’étais bouleversée pour les gens qui les écrivaient, qui le ressentaient de cette façon. J’ai senti que, pour eux, si je disais que c’était beau, ça minimisait toutes leurs difficultés. Hors, ce que vie une personne, n’est pas nécessairement la même chose pour une autre. De dire que je suis bien n’enlève rien aux autres. Mais visiblement cela dérange. Pourtant, deux personnes peuvent vivre la même situation et réagir totalement différemment.
Je vous rassure, les années sont passées et je pense toujours la même chose; j’aime l’autisme. J’aime la différence. Je suis bien avec celle-ci et je n’ai pas d’amertume. Ne m'en voulez pas si je n'ai pas pleuré.
Par contre, je dois l’admettre, je pense encore à ces parents qui ressentaient tant de colère et de peine, et ça me bouleverse encore. Cela ne doit pas être facile pour un enfant de voir, de ressentir ou d’entendre son parent parler de deuil alors que l’enfant est bel et bien là... vivant, prêt à tout découvrir avec ses parents.
L’autisme n’est pas une fatalité.
Ne pas s’attendre à un tel diagnostic est bien possible. Chercher à comprendre est légitime. Le manque d’information crée peut-être cet inconfort que certains parents ont. L’incertitude de l’avenir peut affecter les parents, mais pour aucun enfant le futur est prévisible.
« Être différent et heureux ce n’est pas irréaliste, par contre penser le contraire c’est être fataliste. »
L’autisme m’a appris à penser autrement, à voir la vie différemment. L’autisme apprend à communiquer sans nécessairement parler. L’autisme nous amène plus loin…
Et viennent les combats, le manque de services, d’inclusion et de compréhension. Certes, ce ne sont pas les meilleurs moments que nous vivons en tant que parent. Est-ce dû à l’autisme? Non, pas du tout.
Tous ces aspects négatifs découlent d’un problème de société, d’ouverture et de conscience sociale. L’autisme n’y est pour rien. Chaque différence est mal servie, que ce soit les gens vivant avec des handicaps physiques ou mentaux, des différences raciales, religieuses, identitaires, tous doivent vivre les exclusions de notre société.
S’il y avait un deuil à faire ce serait le deuil d’une société ouverte. Le plus dur des combats serait de rendre la société inclusive. L’autisme c’est beau. Lorsque les autistes pourront vivre tels qu’ils sont et être inclus dans les décisions, nous aurons fait un pas de géant. Avoir un enfant autiste ce n’est pas triste. C’est à nous tous de changer nos destins et d’ouvrir le chemin.
Amélie Bastien,
Autisme, la boîte à outils